(Épître aux Éphésiens, V, 8)
Parents, maîtres et éducateurs, nous avons pour mission de mener les âmes des enfants vers la Lumière qui sera le chemin de leur vie et leur bonheur. Chaque semaine, nous vous proposons de découvrir quelques paroles de guides et de témoins pour éclairer notre propre route à l'aune de cette parole de saint Thomas d'Aquin : “Ne regarde pas à celui qui parle, mais tout ce que tu entends de bon, confie-le à ta mémoire.” (Seize conseils pour acquérir le trésor de la science). Bonne lecture !
Voici un iris, deux narcisses, une jonquille… et là ? Nichée dans la haie, une famille de pâquerettes, de celles qui ont le bord frangé de rose depuis que le petit Jésus en a embrassé une qui était toute blanche. – Te rappelles-tu la légende ? demande maman qui vient s’assurer que je n’ai pas trop chaud. Si je me la rappelle ! C’est Nanon qui me l’a racontée. Je vous la redis – en français, hélas ! – mot pour mot : Lorsque l’Enfant Jésus reçut les présents des Rois Mages, il les bénit « par bonne manière » mais il ne les prit pas. Il les caressa seulement de sa petite main pendant que le roi tout noir, le vieux tout blanc et le grand, qui est un peu marron, lui faisaient leur prière. De l’or ? Pauvre de nous ! mais qu’est-ce que vous voulez qu’il en fasse, le bon Jésus ? ça lui est bien égal, l’or, ce n’est pas pour cela qu’il s’est fait petit, petit. L’encens ? Le bon Jésus tétait encore : le temps n’était pas venu d’en brûler aux pieds de sa mère. La myrrhe ? C’est pour quand on est mort. Le bon Jésus a bien écouté les trois rois et, en remerciement, il a ramassé dans la paille une pâquerette blanche qu’un pastrihoun (petit pâtre) lui avait apportée, il l’a doucement embrassée et l’a offerte au plus vieux des Rois Mages. C’est depuis ce baiser que les pâquerettes ont le bord des pétales couleur des lèvres de l’Enfant Jésus.
Marie Gasquet (1872-1960)
Romancière, Reine du Félibrige
« Soir après soir, dimanche après dimanche, Katrina restait seule, attendant et espérant que son fils rentrerait. Mais il ne vint pas. L’hiver fut long et lourd. La veille de Noël, elle s’attendait à voir Gustav revenir à la maison. Elle avait décoré l’arbre de Noël, elle avait préparé des paquets, elle avait cuit des gâteaux aux épices et des bonshommes de froment avec des yeux de raisins secs. Elle avait servi le poisson macéré de tradition et le riz aux amandes. Puis elle s’assit et elle attendit le fils. C’était Noël aujourd’hui, il reviendrait. Elle alla sur le seuil et écouta. C’était une magnifique nuit de Noël. Le ciel était haut et profond et les étoiles semblaient briller les unes sur les autres tant elles étaient serrées. Sur la montagne, la neige scintillait, vierge, sans une trace. En bas, au village, il y avait plus de lumières qu’à l’ordinaire. C’était Noël dans tous les foyers sauf dans le sien. Même la petite cabane de Beda était illuminée comme un château. Elle pouvait voir les bougies du sapin et les silhouettes des enfants qui couraient et sautaient. Lydia l’avait invitée à se joindre à eux, mais elle avait refusé, disant que Gustav allait venir. Comme tout était silencieux, comme tout était clair et beau ! Vraiment c’était ici le plus bel endroit où l’on pût habiter à Torsö. Elle pouvait voir chaque ferme, toute la vallée jusqu’à la baie. Comme les étoiles brillaient : ici c’était la Grande Ourse. Les trois Rois Mages avaient tout leur éclat. Elle n’était pas très sûre au sujet de Vénus, mais elle reconnaissait bien l’Étoile Polaire, c’était celle qui était tout au loin au nord. Il y aurait dû y avoir une autre, une grande étoile scintillante, l’Étoile de Noël. Où était-elle ? “Je vous annonce une nouvelle qui sera pour tout le peuple une grande joie, c’est aujourd’hui, dans la ville de David, que le Sauveur qui est le Christ, le Sauveur est né.” Katrina rentra. Elle alluma une chandelle et ouvrit la Bible. Elle lut longtemps, verset après verset. C’était comme si une main douce, calmante, se fût posée sur son cœur. Tard dans la soirée, elle referma le livre et elle alluma la lampe à pétrole sur l’étagère. Elle brûlerait toute la nuit. Au temps de son enfance, on laissait toujours les lampes brûler pendant la nuit de Noël. Puis elle se coucha. Elle se leva vers quatre heures du matin et se hâta d’éteindre la lampe. Ensuite elle s’habilla, elle alla traire la vache, but le café et passa le vêtement qu’elle mettait pour aller à l’église. Elle accompagna la famille de Beda et bientôt tout un petit groupe se joignit à eux sur le chemin de l’église. Les gens sortaient de chaque ferme. Les fermiers conduisaient leurs familles en traîneau, dans l’air on entendait distinctement le son des grelots. Dans chaque domaine, et jusque dans la plus pauvre cabane, on avait illuminé ; aux fenêtres, les chandelles brillaient d’un éclat doux. On voyait les sapins de Noël pleins de bougies. Les étables aussi étaient illuminées, car ceux qui restaient dans les maisons prenaient soin des bêtes et leur donnaient la ration supplémentaire de Noël. Les étoiles étaient encore au ciel et la neige s’étendait immaculée sur les champs et les prés. Les arbres sombres de la forêt de Söderöjen semblaient dormir d’un sommeil magique et la neige pesait sur leurs branches étalées. Les gens qui s’avançaient doucement sur le chemin entendaient parfois le bruit ténu de la neige qui tombait d’une branche qui se redressait lentement. Les cloches sonnaient et leur son se mêlait à l’écho des grelots qui s’évanouissait au loin dans le silence de la nuit d’hiver. C’était comme si tout l’espace était rempli d’un chant, d’un seul, le vieux chant éternel “Paix sur la terre”. Dès le lendemain, on commença à s’inviter dans les fermes et Katrina se réjouit que les fêtes fussent si avancées, car le temps passait plus rapidement. Malgré tout, elle ne se sentait pas malheureuse. Ce Noël avait été beau et inoubliable à sa manière. Il l’avait comme purifiée, il l’avait élevée vers l’Éternel. »
Sally Salminen (1906-1976)
Auteur de Katrina (roman suédois)
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