« Le sage ne doit jamais laisser paraître sur son visage les souffrances qu’il a au coeur. »

Sieur de JOINVILLE (1224-1317)
Noble champenois, biographe de Saint Louis

« Le roi chevalier, le roi prud’homme : ce saint fut, selon Joinville, un chevalier d’une vigueur physique égale à son courage moral, d’humeur diverse, violent et colère d’instinct, mais maître de soi, poussant jusqu’au scrupule l’honneur et l’honnêteté, respectueux de la parole donnée, même envers les ennemis ; un chevalier courtois, soucieux pour lui et autour de lui des convenances, sobre, vêtu sans recherche, mais non sans goût, agréable causeur, grave et spirituel à la fois, moqueur à l’occasion ; un chevalier aussi sage qu’un clerc, aussi sensé qu’un bourgeois, simple avec le peuple, auquel il rendait lui-même justice, et aimé de lui : bref, le prud’homme, idéal de Joinville et idéal du siècle, et dont il disait lui-même : preudom vaut mieus que béguins. Au reste, sa foi spontanée, que la théologie éclairait, son horreur du péché, le sérieux avec lequel il prenait la vie, plus encore sa charité profonde et délicate faisaient de lui, entre les chrétiens, mieux qu’un béguin, un saint dont la parole confessait Dieu et dont les actes révélaient la présence de Dieu en lui. Oublieux de sa personne, dévoué jusqu’au sacrifice au peuple chrétien qui était son peuple, s’il mit son corps en aventure, c’est à l’exemple du Christ. Héros de la grâce, à qui même l’auréole de la souffrance ne manqua pas. Il fut martyr, proclame Joinville, car, si Dieu mourut en croiz, aussi fit-il car croisiez estoit-il quand il mourut à Thunes. »

Elie DECAHORS (1885-1961)
Professeur de Langue et Littérature française à la faculté libre des Lettres de Toulouse